Microorganisme du cercle polaire

L’ange de mer, Clione limacina, illustre la beauté, la diversité et l’interdépendance du Vivant sur notre planète @ Anna Deniaud 

 

Chaque organisme sur Terre est le résultat de milliards d’années d’interactions avec son milieu naturel et de coévolutions avec les autres êtres vivants. Sa capacité à vivre dépend de la qualité, de la stabilité et de la diversité de son milieu et de ses relations avec lui. Les humains n’échappent pas plus que les autres espèces à cette règle.
Nous faisons partie du Vivant. 

 

Or, jamais dans l’histoire récente de la Terre autant de changements ne s’étaient produits en si peu de temps. Les ressources en eau douce sont fortement altérées et les émissions de nouvelles entités(1) dans l’environnement menacent l’intégrité et la fonctionnalité des écosystèmes. La surexploitation des milieux naturels et espèces a conduit, en à peine 50 ans, les populations d’animaux sauvages à chuter de près de 75%(2) tandis que la trajectoire d’émissions de gaz à effet de serre nous conduit vers une augmentation, à la fin du siècle, de +2,9°C de température moyenne de la planète. L’activité humaine perturbe si vite et si fort les conditions de vie sur Terre que la santé globale des espèces et écosystèmes est menacée, et par là-même, la santé humaine.

 

Les microorganisme marins se mêlent aux microplastiques (en vert et rouge) créant de nouvelles zones de vie qu’on appelle la plastisphère © Samuel Bollendorf

 

Notre planète est déjà engagée dans une irréversible transformation, mais l’ampleur de ce changement dépend encore pleinement de l’envergure de notre mobilisation et de notre capacité à comprendre que les différents bouleversements que nous connaissons (climat, eau, biodiversité, pollution) ne sont en réalité que les facettes d’une seule et même problématique :
la crise de notre relation au Vivant.
 

 

Depuis plus de 20 ans, les expéditions scientifiques menées par la Fondation Tara Océan, aux côtés de laboratoires partenaires internationaux et multidisciplinaires, étudient la complexité du Vivant et son devenir. Cette science est cruciale pour comprendre les liens entre biodiversité, changement climatique et pollution. L’engagement de la Fondation Tara Océan à défendre le Vivant et protéger l’Océan s’appuie sur le constat de ces liens et la volonté d’apporter des solutions systémiques.

 

La mise à l'eau des filets de prélèvement est une étape cruciale de la science à bord de Tara

La mise à l’eau des filets de prélèvement est une étape cruciale de la science menée à bord de Tara – © Maéva Bardy, Fondation Tara Océan

 

Aucune action prétendant diminuer notre atteinte à l’une des limites planétaires(3), ne devrait avoir comme conséquence l’accroissement de l’impact sur une autre limite. Chaque action devrait concourir, in fine, à un objectif unique : préserver le Vivant. Sans cela, le risque est grand de ne pas apporter de réponses aux bonnes questions et de traiter les urgences auxquelles nous devons faire face en compromettant l’avenir.

 

Nous constatons que les réponses politiques, économiques et sociétales se font de manière séparée et hiérarchisée. Les politiques de lutte contre le changement climatique ont longtemps éclipsé la question de la biodiversité ou celle des conséquences de la présence de nouvelles entités dans l’environnement. Mais comment traiter la question climatique sans aborder celle de la production des plastiques, grande contributrice aux émissions de gaz à effets de serre ? Et comment ignorer le rôle crucial des organismes vivants océaniques dans la pompe à carbone ?
Ce constat appelle désormais à recréer un dialogue entre les sciences fondamentales, humaines et sociales, la société civile et la sphère politique pour permettre une prise de décisions éclairées et construites dans une vision globale.

 

Si beaucoup attendent des solutions technologiques qui permettraient de conserver un modèle de société à l’origine même des problèmes, il nous faut faire le constat que baser tous nos espoirs sur de seules hypothétiques nouvelles technologies serait déraisonnable.
De fait, les solutions et l’innovation sont essentiellement à imaginer au niveau de nos modes de production et de consommation ainsi que dans les valeurs de notre société, actuellement incompatibles avec les limites planétaires. La complexité infinie de la biodiversité restera longtemps un champ intarissable de découvertes, d’enrichissement intellectuel et d’émerveillement qu’il nous faut continuer à explorer. Sciences de la connaissance, réflexions éthiques et débats démocratiques doivent permettre une juste évaluation de la pertinence des solutions technologiques. Nous devons être à la fois ambitieux avec une vision sur le long terme mais également humbles pour aborder de la meilleure manière possible les questions de protection et de préservation de la biodiversité.

 

Défendre le Vivant, protéger la santé globale et assurer une justice environnementale et sociale, telles doivent être les priorités de chacune de nos réponses aux défis actuels.
Il s’agit de bâtir ensemble un nouveau projet de société en harmonie avec le Vivant.

 

Ensemble,
Défendons le Vivant.
Protégeons l’Océan.

 

Récifs coralliens sous une lumière luminescente

Inspirons-nous de l’harmonie des récifs coralliens pour bâtir un nouveau projet de société © David Clode

 


(1) Les nouvelles entités comprennent les substances et produits chimiques synthétiques (microplastiques, perturbateurs endocriniens, polluants organiques), les matières radioactives (déchets nucléaires, armes nucléaires) et les interventions humaines dans les processus d’évolution, telles que les organismes génétiquement modifiés (OGM) et d’autres modifications directes de l’évolution.
(2) Rapport Planète Vivante, WWF (2024)
(3)https://www.stockholmresilience.org/research/planetary-boundaries.html