L’eutrophisation, une problématique importante en mer Baltique

Les espaces aquatiques sont soumis à différentes pressions environnementales venant des activités humaines, telles que l'agriculture, l'industrie et les rejets domestiques… La prolifération massive de microalgues et de bactéries dans le milieu aquatique, conséquences de ces pressions anthropiques, a un impact sur les écosystèmes côtiers et les populations locales. En ayant une meilleure compréhension des pollutions existantes et de leur origine, des temps d’échanges avec les parties prenantes concernées, tels que les Tara Europa Lab, permettent d’identifier des pistes d'améliorations.

Estonie - Tara
Estonie – Tara ©Alexis Gilli – Fondation Tara Océan

Qu’est-ce que l’eutrophisation ? 

Il s’agit d’un phénomène biologique qui apparaît lors d’un important apport en nutriments dans le milieu. Ces charges arrivent notamment par le biais de l’agriculture, par les intrants agricoles, comme les engrais/fertilisants qui permettent de faire pousser plus rapidement les plantes sur la terre. Cependant les quantités apportées aux écosystèmes sont souvent très importantes ; provoquant un écoulement de l’excédent des nutriments dans le continuum aquatique des rivières vers les zones côtières. Une fois dans l’eau, ces nutriments stimulent la croissance de microalgues et de bactéries en proportions telles qu’elles asphyxient le milieu. C’est le phénomène d’eutrophisation.

L’eutrophisation s’observe surtout dans les écosystèmes dont les eaux se renouvellent lentement. Les régions littorales et les estuaires sont touchés par ce phénomène, car leurs eaux sont peu brassées et reçoivent des rejets issus de l’activité humaine. En fonction des régions, il existe différents types d’espèces de phytoplancton qui se développeront plus rapidement que d’autres. 

Cas de la mer Baltique

La mer Baltique est un bassin océanique relativement clos : le cycle de renouvellement de l’eau peut durer jusqu’à 30 ans. Toutes les pollutions liées aux activités humaines vont donc ruisseler jusqu’à la mer et s’y concentrer en quantité extrêmement élevée. 

Ce sont les cyanobactéries fixatrices d’azote qui vont avoir tendance à se multiplier dans cette zone en formant des efflorescences très importantes. L’eau devient verte, le phytoplancton s’accumule à la surface de la zone.

Eutrophisation
Cyanobactéries sur un filtre
Cyanobactéries sur un filtre ©Anne-Kristell Jouan – Fondation Tara Océan

Ce phénomène est de mieux en mieux connu, mais il est encore nécessaire de comprendre l’impact des activités humaines sur les écosystèmes aquatiques. 

C’est, entre autres, pour tenter de répondre à ces questionnements que la goélette Tara est actuellement au large des côtes européennes pour échantillonner les eaux côtières.  

Une expédition de 2 ans lancée en avril 2023, Tara Europa s’inscrit dans le programme TREC (TRaversing European Coastlines) en partenariat avec l’EMBL (European Molecular Biology Laboratory). Les échantillonnages se font en deux temps : l’année 2023 étant consacrée à l’étude des côtes du Nord de l’Europe alors que 2024 sera consacrée à la côte Méditerranéenne. 

A la fois à terre et en mer, les mêmes protocoles standardisés sont mis en place. Ainsi seront échantillonnés : 

Carte Tara Europa 2024
Zoom carte

Carte de l’expédition Tara Europa et zoom sur l’échantillonnage en mer Baltique © Fondation Tara Océan

En mer Baltique, par exemple, Tara a pu échantillonner au large de la Pologne (Sopot), de la Lettonie (Riga), de l’Estonie (Tallinn), mais également sur les côtes suédoises (Stockholm et Kristineberg). 

Le fait de suivre simultanément le même protocole d’échantillonnage dans une même zone, à terre et en mer, permettra d’avoir une vision d’ensemble de ce qui se passe dans les différents écosystèmes.

Pour la première fois, les scientifiques pourront comprendre et comparer les processus à l’œuvre dans les écosystèmes côtiers d’Europe du Nord (mer Baltique) et du Sud (Méditerranée), par exemple.

Des données comparables entre deux écosystèmes sont très difficiles à trouver et c’est ce qui fait la force du programme Tara Europa/TREC

Quelles sont les problématiques liées à la prolifération massive de phytoplancton ? 

En général, l’eutrophisation modifie l’ensemble des écosystèmes. 

En plus d’asphyxier la zone où a lieu une prolifération massive, diverses problématiques avec des effets directs et indirects peuvent apparaître, comme par exemple : 

Solène Caous - Filet régent
Filet Régent – Solène Caous ©Anne-Kristell Jouan- Fondation Tara Océan

Quelles sont les solutions face à ces efflorescences ? 

À Tallinn (Estonie), un temps d’échange a été organisé avec différents acteurs européens lors d’un Tara Europa Lab*. La problématique de l’eutrophisation a permis de définir des pistes d’amélioration autour de la transition des activités agricoles et industrielles à terre.  

Le gouvernement estonien, au travers d’Harry Liiv, membre du ministère estonien du Climat et de la Commission d’Helsinki, a pu, par exemple, aborder les aspects économiques et sociaux que la lutte contre l’eutrophisation soulève, ainsi que les mesures d’ores et déjà mises en place comme les quotas d’intrants alloués aux pays côtiers de la mer Baltique. 

Beaucoup reste encore à faire, mais l’ensemble des participants a salué cet espace de dialogue autour d’un des enjeux environnementaux prioritaires pour l’Estonie et ses pays frontaliers.

Ainsi, en étudiant les écosystèmes côtiers, en comprenant les problématiques locales et en collaborant avec les acteurs locaux, des solutions pourront être identifiées et mises en place.

*Rencontre entre les scientifiques de TREC et acteurs locaux (ONG, décideurs et décideuses politiques, représentants d’activités industrielles locales, etc.).

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