Pollution plastique, les solutions sont circulaires
La pollution de l’Océan par les plastiques n'épargne aujourd'hui plus aucune zone du globe. Ces plastiques, aux conséquences dramatiques pour la biodiversité, sont majoritairement présents sous forme de micro- fragments, rendant le nettoyage de l’Océan illusoire. Les solutions sont donc à terre. Mais comment agir concrètement ?
Pour définir les meilleures solutions, il faut remonter aux sources du problème. Le modèle économique actuel, basé sur l’extraction de ressources, leur transformation puis leur destruction, épuise la planète et génère des déchets en masse. C’est vrai quelques soient les ressources, qu’elles soient d’origine organique ou géologique. Cette impasse a été pointée dès 1972 par un rapport scientifique, dit “rapport Meadows” du nom de son auteur principal.
L’économie circulaire, qu’est-ce que c’est ?
Théoriciens de l’économie circulaire, Michael Braungart et William McDonough s’appuient sur le rapport Meadows et développent, dans les années 90, un modèle visant à sortir de cette consommation linéaire des ressources. Il s’inspire de la nature et du fonctionnement des grands cycles écologiques (eau, carbone, …).
Ils proposent la stratégie des 3R, comme réduire, ré-utiliser, recycler. Les 3R sont à la fois hiérarchiques et complémentaires. La priorité est de réduire notre consommation de ressources, puis d’allonger la durée de vie de nos objets par la réutilisation et la réparation et enfin de recycler ceux hors d’usage.
Cette stratégie devrait permettre des boucles économiques vertueuses où les matériaux sont réutilisés à l’infini. Mais de la théorie à la pratique, des difficultés surgissent. Le recyclage des déchets génère à son tour de la consommation d’énergie, de nouvelles pollutions.
Le concept d’économie circulaire s’enrichit alors, tout récemment, du concept de « non-nocivité envers le vivant ». L’enjeu final étant bien de préserver la biodiversité, à laquelle l’homme appartient. C’est bien la préservation du vivant qui conditionne l’avenir de l’humanité.
L’économie circulaire, une solution aux pollutions plastiques ?
L’économie circulaire n’est pas une baguette magique mais plutôt un cadre de réflexion pour construire des solutions. Seule une vision exigeante de l’économie circulaire, telle que la porte la Fondation Tara Océan, peut efficacement nous permettre de lutter contre les pollutions plastiques.
Doit-on interdire les plastiques ?
Par leur faible biodégradabilité, par la toxicité de certains (PS, PFCs, ..) les plastiques posent des problèmes particuliers. Mais ils sont parfois irremplaçables et leur substitution par du verre, du bois, du carton, … n’est pas sans conséquences et crée d’autres impacts, préjudiciables pour le vivant, comme la déforestation pour produire du carton, par exemple, ou encore la sur-exploitation du sable pour produire le verre..
Alors quelles solutions l’économie circulaire propose-t-elle ?
Bien sûr, de réduire drastiquement les produits à usage uniques ou éphémères, et pas seulement les emballages. Ils sont, par essence, le contraire de l’économie circulaire. Puis d’éco-concevoir les produits. Cela signifie garantir leur longévité, leur réparabilité et enfin recyclabilité.
Quelle place pour les plastiques demain ?
Il faut repenser nos usages des plastiques. Mettre à profit leurs propriétés, en particulier leur extrême résistance, de façon plus intelligente. Ils doivent donc n’être utilisés que dans des produits utilisés longtemps et, in fine, collectés de façon systématique pour recyclage. Les plastiques les plus toxiques pour l’environnement et ceux dont le recyclage n’est pas possible dès à présent doivent être abandonnés. Comme par exemple le cas des emballages en PS qui composent l’essentiel de nos pots de yaourts.
Sommes-nous sur la bonne trajectoire ?
Le concept d’économie circulaire est récemment apparu dans le débat public. Mais sa dimension systémique est trop souvent ignorée, l’économie circulaire est trop souvent réduite au seul recyclage. Or, le recyclage n’est qu’une infime partie de l’économie circulaire. Réduction, réusage doivent enfin prendre leur place dans nos projets de société et toujours … dans le respect du vivant.
Pourquoi le recyclage ne suffit pas ?
Triez, recyclez ! Derrière l’injonction adressée au citoyen-consommateur, se cache l’illusion d’un modèle basé sur la croissance continue de consommation de ressources. Mais un modèle basé exclusivement sur l’amélioration du recyclage présente de nombreux défauts dont l’un et non des moindres est d’être irréaliste.
En effet, pour être recyclé, c’est-à-dire transformé en matière ré-utilisable, un objet doit tout d’abord être collecté. Nos systèmes actuels sont défaillants. Ils pourraient grandement être améliorés avec, par exemple, des dispositifs comme la consigne. Mais même ainsi, il n’existe aucun dispositif garantissant une collecte efficace à 100%.
Nous avons par exemple chiffré que la mise en place du système le plus performant de collecte de bouteilles en plastique générerait encore une perte de 105 millions de bouteilles par an, et rien que pour la France ! Cela démontre que pour réduire la pollution plastique, il faut avant tout réduire les volumes.
Il faut ensuite prendre en compte que les objets de notre quotidien ne sont, pour l’essentiel, pas conçus pour être recyclés. Composés souvent de plusieurs matériaux, non séparables, ils sont un casse-tête pour le recyclage et imposent de coûteuses opérations de tri et conditionnement. Les briques cartons sont ainsi composées de plastiques, d’aluminium, de carton, d’encres et de vernis. On pourrait améliorer cette situation grâce à une éco-conception exigeante.
Mais resterait encore à lever d’autres limites, économiques cette fois. La matière issue du recyclage peine souvent, pour des raisons de coûts de production, à être compétitive face aux matériaux vierges. Un frein que seul un schéma de ré-équilibrage des coûts très complexe pourrait lever.
Enfin, aucun emballage ne suffit, lorsqu’il est recyclé, à produire un emballage neuf identique. Les opérations de recyclage induisent de la perte de matière. Une bouteille recyclable ne suffit donc pas pour produire une nouvelle bouteille 100%.
En conclusion, on peut souligner qu’il ne s’agit pas de remettre en cause le recyclage, mais bien de lui redonner sa juste place, celle du dernier maillon d’une stratégie d’économie circulaire dont la mise en œuvre soulève d’immenses défis, techniques, logistiques et sociétaux.
La Fondation Tara Océan engagée pour l’économie circulaire
C’est cette vision systémique de l’économie circulaire que porte la Fondation Tara Océan. Auprès du législateur (gouvernement, députés, sénateurs) pour construire un cadre qui prenne en compte l’ensemble des enjeux de société mais aussi avec les entreprises les plus en capacité d’agir. Développement du vrac, consigne sur les emballages et sur les produits éphémères, extension des garanties légales, réglementation de l’étiquetage, interdiction des plastiques les plus problématiques sont quelques exemples des sujets défendus par l’équipe plaidoyer de la Fondation Tara Océan.
Quel regard porte la Fondation Tara Océan sur la loi économie circulaire (AGEC) ?
Très mobilisée sur ce texte, la Fondation Tara Océan en a favorablement accueilli les ambitions historiques. C’est le premier texte à avoir clairement posé des objectifs de réduction des plastiques à usage unique, en accord avec les ambitions européennes. Mais des ambitions à l’action il y a un pas qui malheureusement n’a pas encore été franchi. Encore une fois les ambitions de recyclage ont été détaillées, les moyens financiers mobilisés. Pour le reste, les ambitions de la loi restent insuffisamment détaillées et applicables, se bornant souvent à des objectifs collectifs, non applicables dans les faits.
Les conséquences sont un flou dans lequel les mauvaises solutions s’engouffrent. C’est, par exemple, le choix de définir les objectifs de réduction en tonnage et non en unité qui provoque l’accroissement des emballages multi-matériaux. Par exemple, en cherchant à éviter la bouteille PET les industriels peuvent avoir recours aux briques en carton. En carton, mais pas que ! Ces emballages contiennent, en effet, du plastique sous forme de films fins et même de l’aluminium parfois. Un emballage qui contient un moindre poids de plastique mais un emballage non recyclable et dont le plastique risque de fuir plus rapidement dans l’environnement.
De la même manière, en n’interdisant pas les plastiques les plus problématiques, en particulier les plastiques styréniques, toxiques et non recyclés, on ne permet pas aux acteurs économiques d’adopter des solutions plus vertueuses car elles nécessitent de nouveaux investissements.
Quelles sont les prochaines étapes ?
La stratégie de la Fondation Tara Océan en matière d’économie circulaire porte à la fois sur les aspects d’information du public, de réduction, réemploi et recyclage des plastiques mais aussi sur l’évaluation environnementale des alternatives aux plastiques. Elle évolue en permanence, s’enrichissant des dernières découvertes de la science mais aussi des réalités socio-économiques de notre époque. Sa dernière version, rédigée pour les élections législatives françaises est téléchargeable
Elle a pour objectif d’accompagner les futurs législateurs et législatrices dans leur réflexion et leur permettre de proposer un nouveau cadre pour réduire les pollutions plastiques. Elle comprend notamment :
- la réduction des emballages à usage unique et objets éphémères, comme la réduction des plastiques souples de petites tailles comme ceux des barres chocolatées, la suppression des lots promotionnels ou l’interdiction de fibres synthétiques dans les lingettes jetables.
- la réduction du nombre de types de plastiques utilisés dans les objets de grande consommation. Aujourd’hui, par exemple, sur le seul marché du yaourt co-existent des pots en PS, PP, PLA, PET, PE avec carton, sans parler de ceux en verre !
- l’amélioration de la collecte qui doit garantir le zéro fuite dans l’environnement avec une attention particulière aux objets les plus problématiques tels les mégots de cigarettes, les lingettes jetables ou les bouteilles de boisson de petits formats.
- le recyclage des matières collectées doit être traité localement pour éviter les transferts d’impacts vers les pays en développement.
Cette vision d’économie circulaire sera également portée par la Fondation Tara Océan dans le cadre des travaux du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEA) pour un traité sur les plastiques.
Pollution plastique dans l’Océan
Quels sont les leviers d’action de la Fondation Tara Océan ?